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La Croix-Rouge dresse le bilan de son projet pilote «image de soi, lien et insertion social » à Saint-Martin

Par Swanee Ngo Kanga
19 January 2024

L’Equipe Mobile d’Intervention Sociale de la Croix-Rouge française (EMIS) présentait mardi le bilan 2023 de sa nouvelle action visant à agir sur la confiance et l’estime de soi des usagers pour faciliter leur réinsertion.

LEVER LES FREINS PSYCHOLOGIQUES

Si la motivation et l’engagement sont bien souvent un challenge, pour les personnes en grande précarité, le rapport à soi peut constituer un véritable frein personnel à la réinsertion sociale et professionnelle. C’est en tout cas le constat des membres de l’EMIS (l’Equipe Mobile d’Intervention Sociale de la Croix-Rouge) sur le terrain à Saint-Martin. Car en effet, comment trouver sa place dans la société lorsque l’on dort à la rue ? Et peut-on s’inscrire dans une démarche pérenne sans estime de soi ? C’est pour adresser ces problématiques que l’EMIS a répondu à un appel à projet lancé par la Direction de l’Economie, de l’Emploi, du Travail, et des Solidarités (DEETS) de Guadeloupe en 2022. Le but : aider les bénéficiaires de l’aide alimentaire à sortir d’une logique d’assistance, et s’orienter vers un accompagnement durable des personnes, grâce notamment à des ateliers spécifiques, tous tournés vers la revalorisation de soi. Art thérapie pour se reconnaitre dans le beau et faire des choses dont on ne s’estimait pas capable, psychomotricité pour se réapproprier son corps et l’apaiser, photographie pour gagner en aisance devant et derrière l’objectif, coaching, pour dépasser les points de frustration et apprendre à porter un regard introspectif, et même jeux de société, pour rompre l’isolement et recoudre du lien social. Sans oublier l’importance de l’hygiène avec un atelier de socio-esthétique visant à fabriquer soi-même dentifrice, gommage et savon avec ce que l’on a sous la main. Une manière de se réapproprier l’image de soi à l’aide d’une approche pluridisciplinaire, et de maintenir l’investissement dans l’accompagnement: «Nous étions jusqu’ici dans l’aide alimentaire, matérielle, administrative, mais on faisait finalement toujours les mêmes choses, explique Farah Viotty, directrice de la Croix-Rouge. Il y avait peut-être un besoin de prendre la problématique sous un autre angle en accompagnant les personnes de manière beaucoup plus large, holistique, moins centrée sur les problématiques administratives qui étaient trop souvent la porte d’entrée des prises en charge».

UNE APPROCHE À 360

En remportant l’appel à projet, l’EMIS, constituée de 4 personnes, a pu bénéficier en 2023 du financement de la Préfecture et de la Collectivité, et se donner les moyens d’un autre suivi, en collaborant notamment avec des intervenants externes: «Nous voulions apporter des outils de réassurance pour permettre aux personnes de vivre des expériences psychologiques, physiques et corporelles qu’elles pourront réutiliser ensuite, reprend Farah Viotty. Je suis moi-même psychologue et psychomotricienne, et c’est une approche qui me parle beaucoup sans laquelle on ne peut pas avancer». Qu’elles soient à la rue ou logées dans une situation de grande précarité, les personnes bénéficiaires de cette action solidaire ont été encouragées à retrouver un positionnement d’acteurs de leurs vies en «retrouvant des espaces de détente, parce que quand on vit à la rue, c’est compliqué de savoir quel jour on est, et il faut les ramener à une réalité spatio-temporelle». En 10 mois, 47 ateliers ont été réalisés, et 60 usagers ont pu bénéficier du projet pilote. Des hommes en majorité (39 contre 21 femmes), avec une moyenne d’âge de 47 ans, dont plusieurs étaient présents lors de la présentation du bilan par l’EMIS: «Je dors sur un matelas dans la rue, mais je suis propre et rasé et je me sens bien, a exprimé Éric, 65 ans. Ils ont fait beaucoup pour moi», «Je suis sortie de beaucoup de choses grâce à la Croix-Rouge», surenchérit Patricia dans l’assistance.

«Une des personnes les plus assidues avec qui je travaillais a réalisé son projet de partir à l’armée», se réjouit quant à elle Ananda Arnell en charge de l’atelier «psychomotricité», en soulignant le rôle central de l’estime personnelle dans cette réussite. «On adopte une vision globale parce que l’humain est global», abonde Farah Viotty qui a annoncé la fin de son activité à la Croix-Rouge, mais s’est dit hautement satisfaite d’avoir pu mener ce projet à bien. Un certificat de participation a été remis aux usagers mardi afin de souligner leur résilience. 

Swanee Ngo Kanga

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