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Le drame de la Savane jugé mercredi au tribunal

Par Ann Bouard
17 September 2021
Le 30 juin 2019, 20h30, une collision entre un pick-up et un scooter avec deux passagers se produit sur la route de la Savane. Les deux jeunes sur le scooter, respectivement âgés de 17 et 18 ans, ne survivront pas à l’accident. Les trois hommes à bord du pick-up étaient finalement jugés hier devant le tribunal de Saint-Martin après une enquête à rebondissements et encore beaucoup de questions.
 
En doublant une voiture, dont la conductrice aurait indiqué par un signe de la main de la dépasser, le pick-up s’était largement déporté sur la gauche heurtant de plein fouet le scooter qui circulait à une vitesse modérée sur le bas-côté de la route. Les passagers du véhicule indiquaient alors n’avoir pas vu les deux jeunes gens. A tel point qu’en état de choc selon leurs dires, ils étaient dans les minutes suivant l’accident pas certains de ce qu’ils avaient heurté. Les gendarmes avaient été immédiatement saisis de l’affaire. L’un des trois hommes, Monsieur R, avait déclaré alors être au volant du véhicule et endossé la responsabilité de l’accident. Son test d’alcoolémie s’était avéré négatif. Au bout de trois jours, l’enquête était close et l’homme inculpé d’homicide involontaire. Il avait été convoqué devant la justice en octobre 2019, mais l’affaire avait été renvoyée au mois de mars, car entre temps un complément d’enquête avait été demandé. Hier, il comparaissait aux côtés des deux autres passagers du pick-up, Monsieur BA et Monsieur BD et les chefs d’inculpation n’étaient plus les mêmes.
 
Deux ans de batailles sur fond d’incohérences et de mensonges
 
En effet, une rumeur courait depuis l’accident : le conducteur du véhicule n’était pas celui qui était poursuivi. C’est la mère de l’une des deux victimes qui a bataillé pour que l’enquête soit reprise et comme elle l’a affirmé hier à la barre pour que la vérité soit faite. Monsieur R n’était pas le conducteur du pick-up, c’était Monsieur BA. A l’issue de procédures complémentaires, Monsieur R a donc été inculpé de dénonciations mensongères à une autorité judiciaire ayant entraîné des recherches inutiles et Monsieur BA d’homicide involontaire en plus des dénonciations mensongères. Le tribunal a du donc reprendre les faits depuis le début. Plus de quatre heures de débats pour faire la lumière sur cet accident et démêler les nombreuses incohérences de l’enquête relevées autant par la partie civile que par la défense. Des débats auxquels assistaient les familles des victimes dans la salle d’audience de Saint-Martin et suivis en visioconférence depuis le palais de justice de la Roche sur Yon par deux des protagonistes, R et BA qui ont quitté l’île depuis ; un départ prévu pour le premier en mission sur l'île, mais un départ délibéré pour BA qui dit ne pas avoir supporté les menaces dont il faisait l’objet. Les deux hommes avouent d’ailleurs avoir tenté de mettre fin à leurs jours suite à cet accident.
Deux ans plus tard, Monsieur BA reconnait les faits et avoue avoir menti. Cet ancien moniteur d’auto-école, puis policier était alors en pleine procédure avec son administration, qui l’avait radié de la police, et explique qu’il était venu à Saint-Martin pour s’oxygéner, mais qu’il ne fallait pas que cela se sache. Il déclare aussi avoir consommé de l’alcool tout au long de la journée mais indique cependant qu’il aurait bien aimé être testé le jour de l’accident. Des raisons qui justifieraient, selon lui, le fait qu’il ait demandé à Monsieur R de déclarer qu’il était le chauffeur. Les deux hommes se connaissent depuis la métropole, et Monsieur R aurait endossé cette responsabilité pour l’aider car il savait qu’il ne devait pas être sur l’île vu la procédure en cours en métropole à son encontre. Le troisième homme, passager, également poursuivi pour avoir menti, a indiqué dans ses dépositions n’avoir rien vu de l’accident car assoupi à l’arrière du pick-up.
 
L’émotion de deux familles brisées
 
Le substitut du procureur note en préambule de son réquisitoire qu’il est toujours compliqué de juger les infractions involontaires, puisqu’elles ne sont pas voulues par l’auteur des faits. Ces affaires sont comme le symbole de la justice, la balance : quoiqu’il arrive les familles ne seront jamais satisfaites. Qui aurait pu penser qu’une personne puisse endosser la mort de deux enfants ? Il demande à ce que Monsieur BD (passager arrière du pick-up) soit condamné à une amende de 1000 €, Monsieur R à six mois de prison avec sursis simple et une amende de 1000€. Pour Monsieur BD, le conducteur réel, il requiert pour sa lâcheté 18 mois de prison dont neuf avec sursis et neuf aménageables. Depuis la métropole et pour la première fois, les deux hommes expriment un sentiment de regret et adressent leurs excuses aux familles. Des familles qui devront attendre le 25 novembre prochain pour connaitre le verdict.
 
Ann Bouard

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