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Un probable féminicide évité de peu…

Par Valérie DAIZEY
6 septembre 2022
Trois années d’emprisonnement avec mandat de dépôt, assorties de 18 mois de sursis probatoire. Tel est le verdict rendu vendredi par le tribunal de Saint-Martin, à l’endroit d’un homme qui croyait pouvoir exercer son emprise et sa violence en toute impunité sur son ex-compagne, qu’il considérait comme étant devenue « sa chose ».
C’est menotté et escorté par les gendarmes que le prévenu, 27 ans, originaire de Guyana, est sorti du tribunal vendredi dernier. Direction Basse-Terre pour y écoper sa peine : 3 années d’emprisonnement dont 18 mois avec sursis. Et pourtant, jugé en comparution immédiate, le prévenu à la barre s’est montré calme, serein, sans prononcer un mot plus haut que l’autre, reconnaissant la grande majorité des faits qui lui étaient reprochés à l’endroit de son ex-compagne : menaces de mort avec arme, harcèlement, dommages causés sur son véhicule, complicité de violence en réunion… Des faits qui ont duré dans le temps, montant crescendo – l’enquête rapporte tout de même 370 appels téléphoniques malveillants, à l’exclusion des messages Whatsapp - et qui se sont conclus ces derniers jours par une scène d’une extrême violence : l’homme aurait prémédité et commandité la descente en pleine nuit chez son ex-compagne qui vit seul avec son enfant, d’un commando composé de deux hommes armés, pour venir en découdre avec la femme. Mais cette dernière a hurlé avec une telle intensité que les individus ont pris la fuite… Il s’en est donc sans doute fallu de peu pour que la victime ne puisse comparaitre à la barre, vendredi dernier, au tribunal de Saint-Martin...
 
Dr Jekyll et M. Hyde
 
Affable, courtois, bien intégré dans la société, soutien de famille pour sa mère qui vit seule avec un autre frère, le prévenu semble bien sous tous rapports. Sauf que l’individu, sous couvert de carences affectives dans son enfance, dixit le rapport d’expertise psychiatrique, aurait en horreur les ruptures. Des ruptures arrivées plus souvent que rarement avec ses compagnes, l’individu aurait la mauvaise manie de croire qu’une fois les premières rencontres consommées, ses compagnes lui appartiennent et qu’il peut exercer tout pouvoir sur elles. Entre manipulation, violences psychiques, harcèlements, pose de tracker sur le véhicule, Dr Jekyll se transforme en Mr Hyde. Un dédoublement de la personnalité du prévenu décrit en filigrane dans les réquisitions de la procureur : « Les faits sont glaçants ! Nous avons ici deux personnalités : le gentil garçon, affable et charmant, salarié modèle… jusqu’au moment où ses conquêtes disent « oui » à ses avances. Et là, c’est un nouveau visage qui se met à jour, celui d’un homme manipulateur, violent, harceleur. C’est en fait un individu intelligent, réfléchi, déterminé… jusqu’au boutiste… Même le Parquet n’y a vu que du feu quand la victime est venue une première fois déposer une plainte. Cette plainte a été classée sans suite, car c’était la parole de l’un contre la parole de l’autre. Mais cette première plainte sera reconsidérée… (…) Nous avons face à nous une véritable bombe à retardement (…) Nous sommes arrivés à l’apogée de l’horreur cette fameuse nuit, qui s’est certes passée en partie hollandaise (lieu de résidence de la victime) mais qui a été préméditée puis diligentée depuis la partie française (lieu de résidence du prévenu), et fait donc partie de la juridiction de ce tribunal ». Car l’affaire est en effet complexe, d’un point de vue territorial, puisque les faits s’inscrivent tant en partie française qu’en partie hollandaise. La victime a aussi déposé une plainte en partie hollandaise, classée également sans suite. Mais pour la Procureur, il n’y a pas de doute, le tribunal de Saint-Martin est compétent : des menaces de mort avec arme à feu (pas retrouvée lors des perquisitions) proférées à Marigot, le prévenu réside en partie française, et les derniers faits auraient été prémédités depuis la partie française.
 
« Tôt ou tard, une femme mourra… »
 
Une enième affaire de violence conjugales, qui a eu un écho auprès du tribunal qui est entré en voie de condamnation avec mandat de dépôt, laissant soulagée la jeune femme victime, car pour elle, elle en est certaine, « une femme mourra tôt ou tard sous les coups de cet homme ». Et la jeune femme victime de prévenir, toujours dans la crainte : « S’il arrive quelque chose à moi ou à mon fils, c’est ce monsieur qui sera responsable, même s’il est en prison… ».
Outre le mandat de dépôt pour sa condamnation à 18 mois de prison ferme, le tribunal a prononcé une interdiction de rentrer en contact avec la victime, une interdiction de détenir des armes et a condamné l’individu à payer 2000 euros à la victime pour son préjudice moral.
Valérie DAIZEY

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