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Un an de prison avec sursis pour 4 minutes de violence

Par Ann Bouard
20 mai 2022
Un homme de 34 ans comparaissait devant le tribunal de Saint-Martin pour avoir violenté sa compagne devant les enfants de celle-ci. Une affaire de plus dans le registre des violences conjugales, qui démontre toute l’importance pour les victimes de connaitre leurs droits et les différentes prises en charge existantes. Ce sera d’ailleurs l’un des thèmes abordés lors de la journée nationale d’accès au droit du 24 mai prochain (voir page 2).
Les faits se sont déroulés en février. Le couple est en ménage depuis presque trois ans et au foyer vivent également les trois enfants de madame, âgés respectivement de huit, sept et cinq ans, qu’elle a eu d’une précédente union. Depuis un an, les violences verbales sont devenues quasi quotidiennes et les violences physiques sont désormais hebdomadaires. L’auteur des faits, lui, ne délivre pas la même version devant les magistrats.
 
La version de madame
 
Ce jour-là, quand il arrive à la maison vers 19h, elle lui demande d’où il vient. En réponse, il la pousse et la gifle, une bagarre s’en suit. Il lui assène des coups de poings, lui jette les objets qui lui tombent sous la main sans toutefois l’atteindre, mais finalement lui donne des coups de pieds notamment sur le bras. Elle sort dans la rue et les voisines lui viennent en aide. Elle indique être restée au foyer ce soir-là car elle n’avait nulle part où aller et a eu peur de se rendre à la gendarmerie. Comme il avait inondé la chambre des enfants, elle dort finalement dans la chambre parentale avec ses trois enfants. Le lendemain à 6h, alors qu’elle dort toujours, il la réveille avec des coups, portés cette fois devant les enfants. A 10h54, l’hôpital lui délivre un certificat médical attestant d’un œdème à l’avant-bras droit et d’une fracture de la diaphyse cubitale (os de l’avant-bras). Elle est actuellement accueillie dans un hébergement d’urgence avec ses enfants.
Elle dira à la barre « c’est une personne agressive, les voisins sont au courant. Il ne respecte ni mes enfants, ni moi ». Elle lui reproche également d’avoir encaisser les allocations familiales et qu’il lui donnait juste « un peu » d’argent pour la nourriture. Le loyer était payé par la CAF. La dame n’a pas de carte de séjour et est en situation irrégulière sur le territoire.
 
La version de monsieur
 
Il conteste la version de sa compagne et décrit non pas des violences mais des chamailleries. Quand il rentre chez lui, après un rendez-vous avec son patron, elle l’attend sur le pas de la porte avec un manche à balai. Après lui avoir demandé où il était, elle lui assène « un coup de bois ». Il indique qu’il a tenté de la repousser mais qu’elle revenait à la charge. Une fois la bagarre terminée, il quitte la maison et revient à minuit, et dort dans la chambre inondée par sa compagne qui est selon lui coutumière du fait oubliant de couper l’eau après sa douche. Une version qui diffère de sa déposition devant les gendarmes dans laquelle il affirmait être revenu que vers 2h du matin car un homme était présent dans son salon. C’est d’ailleurs ce qu’il reproche à sa compagne, de recevoir des hommes à la maison. Il affirme par ailleurs qu’elle ne travaille pas, ne fait rien à la maison, qu’elle boit et qu’il subvient aux besoins de tous, emmène les enfants à l’école, etc. Finalement, il reconnait qu’il y a eu des claques de temps en temps … et admet avoir frappé fort, sans le faire exprès, car c’est juste une bagarre qui a dégénéré.
L’homme souffre depuis son plus jeune âge de maux divers, suite à un traumatisme crânien. Bien qu’ayant suivi un cursus pour obtenir un BEP en mécanique bateau, interrompu en raison d’une hospitalisation dont il n’a pas voulu révéler la cause devant le tribunal, il est aujourd’hui sans profession et vend le produit de sa pêche.
 
Le verdict du tribunal
 
L’avocat commis d’office demande pour la victime un renvoi sur intérêts civils, de nommer un médecin expert, de dispenser sa cliente des frais de consignation et que l’homme verse à son ex-compagne une provision sur frais de 3000 €.
Le ministère public juge les frais graves, et requiert six mois de prison assorti d’un sursis probatoire de deux ans, une interdiction de contact avec la victime, son indemnisation, une obligation de soin.
Après en avoir délibéré, le tribunal a condamné l’homme à un an d’emprisonnement avec un sursis probatoire de deux ans, à l’indemnisation de la victime, à l’interdiction d’entrer en contact avec elle et de détenir une arme et à l’obligation de se soigner pour sa dépendance au cannabis. Une expertise médicale doit être réalisée et l’affaire est renvoyée sur intérêts civils en janvier 2023.
Ann Bouard

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