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«C'est pour quelle affaire ?»

Par Ann Bouard
12 avril 2022
En cours d’exécution d’une peine d’un an, jusqu’au 5 décembre prochain, pour une autre affaire, le prévenu était auditionné en visioconférence depuis la prison de Basse-Terre par le tribunal de Saint-Martin. L’homme n’en est pas à ses premiers méfaits à tel point, qu’il ne sait plus pour quelle affaire il est jugé. C’est la juge qui doit lui rappeler le chef d’inculpation : vol par effraction dans un commerce de Marigot.
En juin 2021, il avait fracturé la porte de service de l’Express, rue de la République, à coup de pied et s’était emparé du fonds de caisse. Les caméras de surveillance avaient enregistré l’action. Il sera rapidement confondu car le gérant du magasin le reconnait facilement ; l’homme a l’habitude de trainer aux alentours et dérobe fréquemment des objets sur la terrasse de son commerce. Ce jour là, il n’y avait rien dans le fonds de caisse, mais la réparation de la porte coûtera 3000 € au commerçant. Pour expliquer son geste, l’homme indique lors de son audition par les gendarmes qu’il est démuni, qu’il n’a pas de revenus et qu’il ne peut travailler.
Dix mois plus tard depuis sa prison, il précise que le premier confinement est tombé à une semaine d’un travail sur un grand chantier et que son lieu d’habitation a été incendié, qu’il a tout perdu, y compris ses papiers. Il indique qu’il touchait le fond : « je n’ai pas volé pour le plaisir et avec du recul aujourd’hui j’ai du mal à accepter ce que j’ai fait ».
 
Un casier chargé
 
Son parcours judiciaire a cependant débuté en 2003, à son arrivée à Saint-Barth, et s’est poursuivi à Saint-Martin à partir de 2013. Son casier compte seize mentions, pour vols, parfois avec violences ou avec arme, effractions, dégradations et usage de stupéfiants. C’est actuellement sa quatrième détention et il est sous le coup d’une interdiction de séjour à Saint-Martin pendant trois ans. Seul répit, dans son cursus judiciaire, une pause de 2018 à 2020, car il était en cure de désintoxication. L’homme de 42 ans, affirme avoir trouvé un certain équilibre en prison où il a réussi à obtenir un travail, pratique le yoga et bénéficie d’un suivi pour lutter contre ses addictions. Il dit rester positif et est conscient que son passé est catastrophique. Il envisage à sa sortie de rester un an en Guadeloupe avant de rentrer en métropole.
 
Un tribunal compréhensif et confiant
 
Le Procureur de la république constate que l’homme « tient des propos lucides et qu’il n’essaie pas de tromper le tribunal. Sa vulnérabilité et ses addictions sont des boulets. J’ai l’impression que l’on a quelque chose de positif, un trop rare exemple d’adaptation en détention. Les faits sont caractérisés mais pas graves. Il est mal parti et il a pris des peines fermes à chaque fois. Il existe des peines plus adaptées, mais il faut qu’il échappe au milieu criminel de Basse Terre et de Saint-Martin ». Il requiert à son encontre une peine de travail d’intérêt général. C’est ce à quoi il sera effectivement condamné : 140h de TIG à exécuter dans un délai de 18 mois, avec mise à l’épreuve à sa sortie,.
« Le tribunal a décidé de vous faire confiance et vous aurez une béquille à la sortie car vous serez suivi pour votre réinsertion » conclut la présidente du tribunal. L’homme risque cependant d’écoper d’autres peines d’ici sa sortie car il est inculpé dans deux autres affaires qui seront jugées en septembre.
Ann Bouard

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