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Un pharmacien devant la justice : acte 2 !

Par Ann Bouard
21 octobre 2020
Dans le trouble post Irma, un pharmacien avait été accusé de pillage. Le 23 septembre 2017, il était interpellé à bord de son véhicule avec 12 105 boîtes de médicaments récupérées dans les locaux de Laborex à Hope Estate. Deux ans plus tard, il est à nouveau cité devant le tribunal, cette fois pour détournement de biens à des fins personnelles. Son employée comparaissait le même jour pour recel de biens.
 
Dans la première affaire, le pharmacien, avait été reconnu coupable du vol de plusieurs milliers d’euros de médicaments chez le grossiste Laborex et condamné en avril 2018, par le tribunal correctionnel de Saint-Martin, à trois mois de prison et 7 500 € d’amende, et à verser au laboratoire 22 657,74 € au titre de préjudice matériel, 15 000 € pour préjudice moral et 10 000 € au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale. Il était également condamné à payer 5000 € de dommages et intérêts au conseil de l’ordre des pharmaciens et 2500 € au titre de l’article 475-1 (frais d’avocats). Il n’avait cependant pas été soumis à une interdiction d’exercer comme requis par le parquet.
Les faits qui lui étaient reprochés jeudi dernier, ont débuté bien avant Irma, et se sont déroulés entre le 1er janvier 2013 et le 29 août 2019. Sur cette période, le pharmacien aurait détourné la somme de 801 945 €, grâce à une comptabilité parallèle et occulte. Au cours de la procédure d’enquête, la justice a saisi une première somme de 41 600 € en espèces dans les coffres de la pharmacie et 200 000 € sur l’un des comptes bancaires du prévenu.
 
Défauts de procédure
 
Chacun des prévenus avait requis les services d’un avocat. Tour à tour, ces ténors du barreau de Guadeloupe, ont repris chaque élément du dossier pour démontrer que la procédure n’avait pas été respectée, et ce à plusieurs reprises.
Concernant l’employée, pharmacienne salariée, mise en garde à vue pour exercice illégal de la médecine, son interrogatoire a dévié sur la comptabilité et elle comparait donc pour recel de biens, alors qu’aucun procès-verbal ne stipule ce changement d’accusation. Les gendarmes vont d’ailleurs poursuivre leur enquête sur ce terrain, alors qu’ils n’ont pas été missionnés par le parquet pour le faire.
Une perquisition informatique (accès à l’ordinateur de la pharmacie) pose elle aussi problème, car réalisée selon l’avocat sans aucune autorisation, sans en avertir le pharmacien et par conséquence en l’absence de celui-ci, et sans présence d'un membre du conseil de l'ordre des pharmaciens. D’autres défauts de procédures seront évoqués par les deux avocats et l’un des deux regrettera que l’ancien procureur Paillard ne soit pas présent pour soutenir son dossier et demander l’annulation des procès-verbaux en cours :
« car être procureur c'est aussi avoir le courage de reconnaître que des erreurs ont été commises. La procédure pénale garantit la protection du citoyen, elle est la colonne vertébrale des décisions du tribunal ». Les deux magistrats demanderont la nullité des différents procès-verbaux.
Après une longue délibération, le tribunal constate l’irrégularité de la procédure et prononce la relaxe pour le pharmacien et son employée. Il ordonne par ailleurs la restitution des scellés, à savoir, les 41 285 € en espèces et les 200 000 € bancaires.

Ann Bouard

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