Économie : les premiers signes d’alertes
En cette rentrée 2024, les indicateurs économiques ne sont pas au beau fixe. Avec l’échéance du dispositif Pinel qui s’arrêtera en décembre, la loi Lodeom sur la sellette et les incertitudes quant à la prochaine loi de finances, l’avenir s’annonce critique pour les entreprises des territoires ultra-marins.
Les conséquences économiques de la crise sanitaire perdurent encore pour certaines entreprises, comme l’atteste le rapport économique 2023 de l'IEDOM qui met en évidence une situation économique précaire où les incertitudes plongent les acteurs économiques dans l'attentisme. De plus, les entreprises redoutent de nouvelles pressions sur leurs coûts et leur trésorerie. Dans ce contexte, les experts prédisent une détérioration de la situation, avec un nombre croissant de liquidations d'entreprises. François Groh, fraîchement nommé à la tête de l’IEDOM (Institut d’Émission des Départements d’Outre-Mer), fait une analyse du climat économique qui ne présage pas d’un avenir radieux. De son côté, le MEDEF dénonce les pratiques de recouvrement de la CGSS/Urssaf qui mettent à mal la santé financière des entreprises du territoire.
LA SURVIE DES ENTREPRISES EN JEU
La CGSS/Urssaf a modernisé ses procédures de recouvrement. Les saisies d'huissiers peuvent désormais être effectuées en quelques minutes, à grande échelle et à distance ! Ce système, s'il est déployé comme prévu, pourrait entraîner la saisie simultanée des comptes bancaires de plusieurs centaines d'entreprises en moins d'une heure, provoquant un véritable choc dans le tissu économique local, indique la CPME et l'Union des Entreprises de Guadeloupe (UDE-MEDEF).
L'annonce selon laquelle le non-paiement des cotisations entraînerait la suspension des prestations sociales et de santé est perçue comme une menace inédite depuis l'installation de la Sécurité Sociale, risquant d'aggraver davantage la situation. La CPME et l'UDE-MEDEF Guadeloupe soulignent l'inadéquation de l'environnement juridique actuel, qui empêche les entreprises de se développer durablement. Les nombreuses lois et règlements se sont accumulés sans apporter de véritable solution aux difficultés structurelles des entreprises domiennes. Les deux instances en appellent à la responsabilité des pouvoirs publics et à la mobilisation des institutions locales pour solliciter ensemble le Préfet et le DRFIP, afin de faire fonctionner le CODEFI et le CCSF comme des services permanents au service des entreprises en difficulté. Pour éviter une catastrophe économique, les syndicats patronaux appellent à la mise en place immédiate de mesures, dont le lancement d'un Service d'Urgence pour Sauver les Entreprises en danger de mort sur la base des orientations de l'URSSAF Nationale présentées en juin 2023. Autres mesures demandées : renforcer le Centre d'information sur la Prévention des difficultés des Entreprises (CIP), avec l'implication active de l'Ordre des Experts-Comptables, un soutien financier pour leur accompagnement, la commande de rapports sur 30 ans d'exonérations de cotisations sociales par les administrateurs de la CGSS/Urssaf, afin de mieux comprendre les impacts des dispositifs actuels et les enjeux et l’organisation d'un Grand Forum « Constats et Recommandations » sur les entreprises et leurs obligations sociales, avec la participation d'experts indépendants.
DES PRÉVISIONS À LA BAISSE
François Groh, qui succède à Thierry Beltrand en tant que Directeur de l’agence IEDOM de la Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy, a de son côté tiré des conclusions de ses premières observations menées en Guadeloupe, depuis son arrivée fin août. Cet ancien directeur départemental de la Banque de France, n’y va pas non plus par quatre chemins. La Guadeloupe, qui a traversé une période de turbulences économiques sans précédent (répercussions de la pandémie), des tensions géopolitiques globales, et des changements climatiques de plus en plus visibles, voit son tissu économique affecté. François Groh souligne la nécessité de connecter l'archipel guadeloupéen au reste du monde et de mieux gérer les éléments naturels.
Dans ce contexte, l’indicateur du climat des affaires (ICA) diminue de 3,8 points au 2e trimestre. Les chefs d’entreprises observent une baisse d’activité et font part de leurs inquiétudes croissantes, accentuées par l’incertitude politique. En parallèle, l’investissement privé est en perte de vitesse, à l’instar de la consommation des ménages. Le territoire est sujet à une inflation persistante, qui se reflète sur l’indice des prix à la consommation (IPC) en Guadeloupe (+3,7% en Guadeloupe) ; indice actuellement en cours de calcul par l’ITSEE à Saint-Martin.
Globalement, les chefs d’entreprise sont pessimistes. S’ils s’attendent à une certaine stabilité dans les secteurs des IAA, des autres industries, du commerce et des services marchands, les prévisions sont moins optimistes pour les secteurs du BTP et du tourisme.