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Carte IGN de 1955, où la frontière longe la côte française, comme revendiqué par la partie hollandaise
Carte IGN de 1955, où la frontière longe la côte française, comme revendiqué par la partie hollandaise

Frontière d’Oyster Pond : vers un accord entre la France et les Pays-Bas

04 February 2022
Le préfet Serge Gouteyron annonçait mardi dernier que des discussions étaient entamées depuis décembre dernier entre les gouvernements français et hollandais, au sujet du différend qui les oppose sur le passage de la frontière au niveau d’Oyster Pond. Si un accord venait enfin à être trouvé sur cette délimitation, le quartier d’Oyster Pond laissé en l’état depuis le passage de l’ouragan Irma, pourrait à nouveau penser à sa reconstruction, en particulier le site de la marina.
« Un projet de traité est à l’étude et devrait être signé en fin de cette année 2022 par la France et la Hollande », a annoncé Serge Gouteyron. Les deux parties qui sont en désaccord depuis des décennies au sujet de la délimitation de la frontière de Oyster Pond seraient donc sur la voie d’un accord.
 
Retour en arrière
 
Pour mémoire, dans le but de régler les conflits entre Etats au sujet du partage des eaux territoriales, aux forts enjeux, une conférence s’est tenue en Jamaïque le 10 décembre 1982 et a donné lieu à un traité international : la Convention sur le Droit de Mer de Montego Bay. Cette dernière qui fixe les eaux territoriales à 12 miles au-delà des lignes de base, pour les 153 pays qui l’ont signée, dont la France et les Pays-Bas, mais pas par les Antilles Néerlandaises, détermine également la délimitation de la mer entre Etats dont les côtes sont adjacentes ou bien se font face, ce qui est le cas au niveau d’Oyster Pond. Rappelons par ailleurs que la Convention de Montego Bay a été signée par 153 pays mais est restée longtemps exempte de toute ratification… La France et les Pays-Bas ne l’ont ratifiée qu’en 1996.
Dans son article 15, la Convention de Montego Bay prévoit pour la délimitation de la mer territoriale entre Etats dont les côtes sont adjacentes ou se font face : « Lorsque les côtes de deux Etats sont adjacentes ou se font face, ni l'un ni l'autre de ces Etats n'est en droit, sauf accord contraire entre eux, d'étendre sa mer territoriale au-delà de la ligne médiane dont tous les points sont équidistants des points les plus proches des lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale de chacun des deux Etats ». Ce même article précise que « Cette disposition ne s'applique cependant pas dans le cas où, en raison de l'existence de titres historiques ou d'autres circonstances spéciales, il est nécessaire de délimiter autrement la mer territoriale des deux Etats. » Et c’est là où la discorde est entrée au regard du pourtant bien nommé « Accord de la Concorde », ou « Le traité du Mont des Accords » signé le 23 mars 1648 entre le sud et le nord de Saint-Martin.
 
Convention de Montego Bay vs Traité du Mont des Accords
 
En effet, cette convention de Montego Bay qui prône le partage des eaux mitoyennes s’oppose au Traité de Concordia qui envisage ces espaces comme communs. L’article 5 du traité de Concordia stipule que « la chasse, la pêche, les salines, les rivières, étangs, eaux douces, bois de teinture, mines ou minéraux, ports et rades, et autres commodités de ladite île, seront communes, et ce pour subvenir à la nécessité des habitants. ». La baie de Oyster Pond est bien une rade et en tant que telle, elle devrait être commune aux deux parties... Les cartes anciennes de Saint-Martin, dont celle de l’IGN de 1955, montrent la ligne de démarcation qui s’arrête bien aux bords de l’étang de Simpson et de la baie d’Oyster Pond, mais en aucun cas ne les traverse, ce qui est bien dans l’esprit du Traité de Concordia. Et dans ce contexte, la marina d'Oyster Pond est bien en eaux françaises… Et à ce titre d’ailleurs, feu l'exploitant du site comprenant la marina et un restaurant bâti les pieds dans l'eau, Olivier Lange, connu sous le nom de Capt’tain Oliver, a payé pendant toutes les années d’exploitation une redevance à la partie hollandaise pour le droit d’usage de l’eau.
En revanche, les carte IGN de 1990 et les suivantes, établies après la convention de Montego Bay (1982), font passer la frontière à égale distance des deux états riverains. Ce qui semble plus logique et en concordance avec la Convention de Montego Bay.
 
Eviter les incidents diplomatiques
 
Toutefois, la partie hollandaise de l’île ne l’entend pas de la sorte, et l’on se souvient de l’incident d’octobre 2016 qui a frôlé l’incident diplomatique, lorsque les autorités françaises étaient allées contrôler un chantier sur la marina, lequel était opéré par la partie hollandaise.
Les autorités néerlandaises avaient alors taclé cet acte comme étant « une violation claire de la souveraineté du Royaume des Pays-Bas » et avaient à la suite boycotté le Saint-Martin’s day, célébré chaque année le 11 novembre en une seule et commune cérémonie par les deux parties de l'île, censée reconnaître l'unité de tout le territoire...

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